Partition de l'âme

Génèse des dieux et des mortels,
L'âme divine et l'âme mortelle, sa partiton :
L'âme irrascible,
L'âme concupiscible et irrationnelle

 

Génèse des dieux et des mortels

Des animaux divins, c’est lui-même qui en fut l’artisan ;

mais pour les animaux mortels, il chargea ses propres enfants de les engendrer.

Ceux-ci prirent modèle sur lui, et,
quand ils en eurent reçu le principe immortel de l’âme,

L'âme divine (immortelle) et l'âme mortelle, sa partition

ils façonnèrent ensuite autour de l’âme (immortelle, divine) un corps mortel
et lui donnèrent pour véhicule le corps tout entier,
puis, dans ce même corps,

L'âme "irrascible", ses passions

ils construisirent
en outre une autre espèce d’âme, l’âme mortelle,
qui contient en elle des passions redoutables et fatales,
d’abord le plaisir, le plus grand appât du mal,
ensuite les douleurs qui mettent les biens en déroute, en outre la témérité et la crainte, deux conseillères imprudentes,

puis la colère difficile à calmer et l’espérance facile à duper.

Alors mêlant ces passions avec la sensation irrationnelle et l’amour qui ose tout, ils composèrent suivant la loi de la nécessité la race mortelle.

Aussi, comme ils craignaient de souiller le principe divin, sauf le cas d’une nécessité absolue, ils logèrent le principe mortel, à l’écart du divin, dans une autre chambre du corps.

Ils bâtirent, à cet effet, un isthme et une limite entre la tête et la poitrine, et mirent entre eux le cou, afin de les maintenir séparés. C’est dans la poitrine et dans ce qu’on appelle le tronc qu’ils enchaînèrent le genre mortel de l’âme.

Et, parce qu’une partie de l’âme est naturellement meilleure et l’autre pire, ils firent deux logements dans la cavité du thorax, en le divisant, comme on sépare l’appartement des femmes de celui des hommes, et ils mirent le diaphragme entre eux comme une cloison. p152


La partie de l’âme qui participe du courage et de la colère, qui désire la victoire, fut logée par eux plus près de la tête, entre le diaphragme et le cou,
afin qu’elle fût à portée d’entendre la raison et se joignit à elle pour contenir de force la tribu des désirs, quand ils refusent de se soumettre de plein gré aux prescriptions que la raison leur envoie du haut de sa citadelle.


Quant au coeur, noeud des veines et source du sang, qui circule avec force dans tous les membres, ils le placèrent au corps de garde, afin que,
lorsque la partie courageuse bouillirait de colère à l’annonce faite par la raison que les membres sont en butte à quelque injustice causée du dehors ou par les désirs intérieurs,
chaque organe des sens dans le corps pût rapidement percevoir par tous les canaux les commandements et les menaces de la raison, leur obéir et s’y conformer exactement, et permettre ainsi à la partie la plus noble de commander à eux tous.

En outre, pour remédier aux battements du coeur, dans l’appréhension du danger et dans l’éveil de la colère, les dieux, sachant que c’est par le feu que devait se produire ce gonflement des parties irritées, imaginèrent de greffer sur lui le tissu du poumon, qui est mou et dépourvu de sang et qui, en outre, contient en lui des cavités percées comme celles d’une éponge, afin que, recevant l’air et la boisson, il rafraîchît le coeur et lui procurât du relâche et du soulagement, dans la chaleur dont il est brûlé. p153


C’est pour cela qu’ils conduisirent les canaux de la trachée-artère jusqu’au poumon et qu’ils le placèrent autour du coeur comme un tampon, afin que le coeur, quand la colère atteint en lui son paroxysme, battant contre un objet qui lui cède en le rafraîchissant, fût moins fatigué et servît mieux la raison de concert avec le principe irascible.

L'âme concupiscible et irrationnelle.

Pour la partie de l’âme qui a l’appétit du manger et du boire et de tout ce que la nature du corps lui rend nécessaire, les dieux l’ont logée dans l’intervalle qui s’étend entre le diaphragme et le nombril, et ont construit dans tout cet espace une sorte de mangeoire pour la nourriture du corps, et ils ont enchaîné là cette partie, comme une bête sauvage, mais qu’il faut nourrir à l’attache, si l’on veut qu’il existe une race mortelle.

C’est donc pour que, paissant toujours à sa mangeoire et logée le plus loin possible de la partie qui délibère, elle causât le moins de trouble et de bruit et laissât la partie meilleure délibérer en paix sur les intérêts communs à tous et à chacun, c’est pour cela que les dieux l’ont reléguée à cette place. p154